Pour des raisons écologiques et esthétiques, notre relation au gazon est en train de changer. Plusieurs personnes délaissent le « tapis vert » au profit d’aménagements plus diversifiés. Cette petite révolution culturelle génère certaines frictions et débats entre les défenseurs de la tondeuse et les amoureux du sauvage. Voici notre lecture de la situation pour - on l’espère - vous aider à vous en « faire une tête »!
Concrètement, le gazon c'est quoi?
Souvent une monoculture d’une ou quelques espèces herbacées dans la famille des graminées. Le gazon est un couvre-sol végétal qui a conquis le continent nord-américain pour le confort des humains. Le gazon c’est un “désert de biodiversité” qui répond à très peu de besoins des autres espèces.
Le gazon est surtout devenu cette surface du quotidien qui, tel un tapis géant, s'est déroulé un peu partout sur la planète. Il s’agit du type d’aménagement paysager utilisé par défaut. Par exemple, on estime que dans la Communauté Métropolitaine de Montréal (CMM) le gazon recouvre 68 000 hectares. C’est 317 fois la superficie du Mont-Royal.
En termes plus philosophiques, le gazon incarne notre déconnexion aux vivants et notre incompréhension à accueillir les processus écologiques de notre milieu de vie. On peut même dire qu’il fait partie de ces « indices » de l'anthropocène; une surface végétale dominante et domestiquée qui altère en profondeur le fonctionnement de nos écologies planétaires - Ouch!
Notre désir insatiable de semer ou dérouler du gazon cause aujourd’hui un problème écologique et éthique en lien avec la diversité biologique de nos milieux habités. Dans nos villes, si une surface n’est pas pavée, elle est bien souvent du gazon. Et ce gazon doit être contrôlé, exigeant énormément d’énergie et ressource pour demeurer manucuré.
Contrevenir à cette logique représente certains risques sociaux, celui de ne plus « fitter » dans le voisinage, ou encore certains risques financiers, car une pelouse trop longue et des aménagements plus sauvages peuvent mener à des amendes dans biens des municipalités du Québec.
Bref, toutes ces années à tondre, arroser, tondre, arroser, ont créé un attachement pour la pelouse partagé par plusieurs. On comprend ça, mais il faut peut-être questionner cette affection héritée d’une autre époque. La pelouse n’est pas un mal en soi, mais la surutilisation de celle- ci dans nos milieux de vie est problématique. La question est alors moins de se camper dans une gang- pro-gazon vs anti-gazon - que de se demander comment on pourrait mieux partager nos milieux de vie avec d’autres espèces que nous. Il y a plusieurs manières de faire ça: on s’ouvre alors à beaucoup plus d’options!
Questionner nos paysages verdoyants
Le gazon nous a appris beaucoup de choses! Il nous a appris à prendre soin, parfois avec obstination, des aménagements paysagers qui nous entourent. Pensez à tout le temps et l’énergie investi dans cette petite graminée bien brossée.
On rêve donc de rediriger cette passion collective, voire cet amour, vers d’autres formes de paysages diversifiés et riches. Des paysages qui représentent peut-être mieux les valeurs et besoins écologiques de notre époque et qui contribuent à relever certains des défis accablants associés aux changements climatiques et au déclin de la diversité biologique.
Pour vous aider à réfléchir à l’avenir de votre gazon, voici quelques réflexions intéressantes:
- Quelles paysages peuvent permettre l’épanouissement de nous et d’une biodiversité en bonne santé?
- Comment mieux soutenir le vivant grâce à mes choix d’aménagements, autour de moi?
- Quel sera mon rôle, en tant qu’humain, vis-à-vis de ce nouveau paysage - probablement généreux, abondant et moins contrôlé?
Avoir moins de gazon
Avoir du gazon ou non - ce n'est peut-être pas la bonne question selon nous. Cette formulation est polarisante, manque de nuance et soulève des questions morales. Comme discuté ici, la question devrait dépasser le « gazon» et ouvrir vers une discussion autour des enjeux ou solutions vis-à-vis la biodiversité et notre relation débalancée au vivant.
Il est évident pour nous que la pelouse a un rôle à jouer dans nos milieux de vie urbains. Étant une surface verte des plus tolérantes face au trafic piéton, elle permet la pratique de biens des activités pour l’humain - notamment pour pique-niquer, jouer au croquet ou marcher nue pied. Avoir une belle pelouse n’est pas un crime, mais avons-nous besoin de 68 000 hectares de pelouse à Montréal pour répondre à ces besoins humains?
Selon nous, s’arrêter à une formule pour ou contre, dans nos réflexions est dommage. On vous encourage à aller plus loin! Peut-être qu’au final, simplement, la meilleure des questions à se poser, c’est : est-ce que je pourrais avoir moins de gazon chez nous?
Généralement, c’est le cas!